Expertise Comptable
Point Comptable octobre 2024 : l’actualité comptable et fiscale des experts-comptables
Le 28 octobre 2024
Modifié le 17 juin 2025
Vous retrouverez ici une sélection des principales mesures du mois : réformes fiscales, évolutions du droit des sociétés, actualité déontologique… Installez-vous confortablement et plongeons dans l'essentiel d’octobre 2024 !
Zoom sur les chiffres : l’actualité comptable et fiscale
Erreur comptable intentionnelle : les juges rappellent qu’elle ne peut être opposée qu’au contribuable même en l’absence de volonté de fraude fiscale
Cour administrative d’appel de Toulouse, 12 septembre 2024, n°23TL01866
Les erreurs relevées dans les bilans d’une entreprise peuvent être corrigées par l’administration fiscale ou par le contribuable si elles ont été commises de bonne foi. En revanche, une erreur comptable intentionnelle ne peut être opposée qu’au contribuable, et non à l’administration fiscale, même en l’absence de volonté de fraude fiscale.
Ce principe a été récemment réaffirmé dans le cas d’une société qui avait enregistré dans son passif des loyers dus à une SCI, conformément à un contrat de bail entre les deux entités, mais les avait crédités au compte courant d’associé de son gérant principal. L’administration fiscale a identifié deux erreurs distinctes : d’une part, l’inscription délibérée d’une dette injustifiée envers le gérant, et d’autre part, l’omission volontaire d’enregistrer une dette équivalente envers la SCI.
L’Administration a rectifié la première erreur mais a opposé la seconde au contribuable. Aucun élément ne permettait de justifier une erreur comptable involontaire. En effet, aucune cession de créance n’avait eu lieu entre la SCI et le gérant, ce dernier détenait 90% de la SCI soumise au régime des sociétés de personnes, et tous les loyers perçus ou à percevoir avaient été déclarés par la SCI.
Quiz
Dans quel contexte l’assiette du crédit d’impôt pour l’industrie verte (C3IV) a-t-elle été assouplie ?
A) Pour les entreprises exportatrices
B) Pour les actifs corporels acquis via des entreprises liées
C) Pour les investissements dans des énergies renouvelables
D) Pour les achats de machines locales
(réponse B)
Crédit d’impôt pour l’industrie verte (C3IV) : assouplissement des conditions d’acquisition
bofip.impots.gouv.fr, 2 septembre 2023
Les entreprises peuvent désormais inclure dans l’assiette du crédit d’impôt pour les investissements dans l’industrie verte (C3IV) les dépenses engagées pour l’acquisition de certains actifs corporels via des entreprises liées, sous certaines conditions. Initialement, seuls les actifs acquis auprès de tiers non liés étaient éligibles, excluant les achats effectués via des centrales d’achats, pourtant économiquement avantageuses.
Pour assurer une neutralité dans les choix de gestion, l’administration fiscale admet que les dépenses réalisées dans le cadre d’un plan d’investissement agréé, pour des actifs achetés par une entreprise liée qui se contente de les acquérir auprès d’un tiers non lié et de les revendre à l’entreprise bénéficiaire avant leur mise en service, soient éligibles au C3IV.
Ces dépenses sont retenues à leur montant hors marge réalisée entre les entités liées.
Présentation du projet de loi de finances pour 2025
presse.economie.gouv.fr, dossier de presse, 10 octobre 2024
Le Gouvernement a dévoilé le projet de loi de finances pour 2025, annonçant un effort total de 60,6 milliards d’€, réparti entre 41,3 milliards d’économies et 19,3 milliards de hausses de recettes fiscales. Voici les principales mesures à la date du 10 octobre :
Effort budgétaire total et réduction des dépenses : l’État devra réduire ses dépenses de 21,5 milliards d’€, incluant la suppression d’environ 2 200 postes, notamment à la DGFiP et à France Travail. Les ministères de la Justice et des Armées bénéficieront d’augmentations budgétaires, tandis que les effectifs du ministère de l’Intérieur seront préservés.
Report de l’indexation des retraites : l’indexation des pensions de retraite sur l’inflation est reportée du 1ᵉʳ janvier au 1ᵉʳ juillet 2025, permettant une économie de 3,6 milliards d’€.
Hausse d’impôts pour les foyers aisés et grandes entreprises : une augmentation temporaire de l’impôt pour les contribuables dont le revenu de référence dépasse 250 000€ pour un célibataire et 500 000€ pour un couple est prévue, touchant environ 65 000 foyers fiscaux. Une contribution exceptionnelle sur les bénéfices des grandes entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur ou égal à 1 milliard d’€ est instaurée, avec des recettes attendues de 8 milliards d’€ en 2025 et 4 milliards en 2026.
Nouvelles taxes et mesures fiscales : le Gouvernement prévoit une taxe exceptionnelle sur le transport maritime pour les entreprises dépassant 1 milliard d’€ de chiffre d’affaires, une taxe sur les rachats d’actions des grandes entreprises cotées en Bourse à hauteur de 8%.
Suspension de la baisse de la CVAE : cette suspension devrait rapporter 1 milliard d’€ en 2025.
Revalorisation des tranches d’impôt : les tranches du barème de l’impôt sur le revenu seront revalorisées de 2% en 2025, évitant à 530 000 foyers d’entrer dans le champ de l’impôt sur le revenu.
Mesures environnementales : une taxe sur les billets d’avion sera instaurée, avec des recettes attendues de 1,5 milliard d’ € en 2025. Le malus automobile sera durci sur les émissions de CO₂ et le poids des véhicules, générant 300 millions d’€ à partir de 2026.
Sortie du bouclier tarifaire sur l’électricité : le Gouvernement prévoit également la sortie progressive du bouclier tarifaire sur l’électricité.
Refonte du système d’allègements généraux de cotisations patronales : il permettrait d’économiser 4 milliards d’€. Cette réforme s’inspire du rapport Bozio et Wasmer, qui préconise l’instauration d’un système unique de réduction dégressive des cotisations patronales jusqu’à trois fois le Smic, remplaçant ainsi les barèmes d’allègements multiples actuellement en vigueur.
Réintégration des amortissements pour les loueurs en meublé non professionnels en cas de cession : lors de la vente d’un bien loué meublé, les loueurs en meublé non professionnels devront réintégrer, dans le calcul de la plus-value immobilière imposable, le montant des amortissements déduits durant la période de location, conformément à l’article 39 C du CGI. Cette mesure s’appliquerait aux cessions réalisées à partir du 1er janvier 2025.
Zoom sur le juridique : l’actualité du droit des sociétés et des entreprises
Le Gouvernement confirme la mise en place progressive de la facturation électronique pour toutes les entreprises dès 2026
presse.economie.gouv.fr, communiqué de presse, 15 octobre 2024
Selon l’article 91 de la loi de finances pour 2024, à partir du 1er septembre 2026, toutes les entreprises devront être en mesure de recevoir des factures électroniques, tandis que les grandes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire seront tenues de les émettre.
Les PME ainsi que les microentreprises devront suivre le mouvement dès le 1er septembre 2027.
Plus de 70 plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) ont déjà été immatriculées sous réserve par la Direction générale des finances publiques (DGFiP), attestant de l’engagement de l’écosystème dans cette réforme. L’État se dit confiant dans la capacité de ces plateformes à proposer des services sécurisés et adaptés aux besoins des entreprises.
Par ailleurs, le Gouvernement poursuit la construction d’un annuaire des destinataires et d’un concentrateur de données pour faciliter les échanges et simplifier la transmission des informations à l’administration fiscale.
Le Gouvernement réaffirme son engagement à accompagner les entreprises dans cette transition numérique majeure.
Lire aussi : « Articles, interviews, webconférences : dossier facturation électronique ».
Entrepreneur individuel : la Cour de cassation confirme l’insaisissabilité de la résidence principale après la cessation d’activité
Cour de cassation, 11 septembre 2024, n°22-13.482
Dans un arrêt du 11 septembre 2024, la Cour de cassation a jugé que la cessation d’activité d’un entrepreneur individuel ne met pas fin à l’insaisissabilité de sa résidence principale.
Un artisan, après avoir cessé son activité et avoir été radié du répertoire des métiers, a été mis en redressement puis en liquidation judiciaires. Le liquidateur a demandé la vente aux enchères de sa résidence principale, mais l’artisan s’y est opposé en invoquant son insaisissabilité. La cour d’appel avait autorisé la vente, estimant que la protection ne s’appliquait plus après la radiation.
La Cour de cassation a cassé cette décision, affirmant que l’insaisissabilité subsiste tant que les créanciers professionnels ne sont pas désintéressés, et que la cessation d’activité ne met pas fin à cette protection.
Toutefois, les créanciers dont les créances ne découlent pas de l’activité professionnelle peuvent poursuivre la saisie. De plus, l’insaisissabilité ne s’applique pas en cas de manœuvres frauduleuses ou d’inobservations graves des obligations fiscales.
Modernisation des réunions des assemblées et organes de décision des sociétés : publication d’un décret
Décret n°2024-904 du 8 octobre 2024 : JO 10 octobre 2024
Un nouveau décret met en œuvre les mesures de modernisation prévues par l’article 18 de la loi du 13 juin 2024, visant à accroître le financement des entreprises et l’attractivité de la France.
Ce texte précise les mentions obligatoires sur les formulaires de vote par correspondance pour les associés de SARL, les administrateurs ou membres du conseil de surveillance de sociétés anonymes et de sociétés en commandite par actions.
Il détaille également, pour les sociétés cotées, les conditions de participation aux réunions des organes de décision via des moyens de télécommunication permettant l’identification des membres, notamment pour le calcul du quorum et de la majorité.
Enfin, le décret établit les modalités de retransmission, d’enregistrement et de consultation des assemblées générales des sociétés cotées.
Éthique et pratique : l’actualité déontologique
Un commissaire aux comptes condamné pénalement reçoit une interdiction d’exercer avec sursis
Décision N°FR2023-31 S, 3 septembre 2024
La Commission des sanctions de la Haute autorité de l’audit (H2A) a prononcé une interdiction d’exercer de deux ans, entièrement assortie du sursis, à l’encontre d’un commissaire aux comptes. Cette décision, rendue publique le 3 septembre 2024, fait suite à une condamnation pénale définitive pour homicide et blessures involontaires commis sous l’emprise de l’alcool lors d’un accident de la route en juillet 2019. Les faits ont été jugés contraires à l’honneur et à la probité exigés par la profession.
Bien que le professionnel ait exprimé des remords et n’ait pas d’antécédents disciplinaires, la Commission a estimé que la gravité des faits nécessitait une sanction pour préserver la confiance dans la profession.
L’interdiction étant assortie du sursis, elle ne prendra effet qu’en cas de récidive dans les cinq prochaines années.
Le Conseil national de l’Ordre des experts-comptables lance La Source, le datalake de la profession au service de l’économie
CNOEC, compte Linkedin, 9 octobre 2024
Lors de la plénière d’ouverture du 79e Congrès de l’Ordre, sa présidente, Cécile de Saint Michel, a annoncé le lancement de « La Source », un datalake destiné à mutualiser les données traitées pour leurs clients.
Cette initiative vise à renforcer le rôle de conseil de la profession en fournissant des indicateurs économiques essentiels pour les entreprises et les décideurs publics.
En participant à ce projet, les experts-comptables contribuent à l’intérêt général en mettant les données au service du bien commun. Cette mutualisation permettra d’accompagner plus efficacement les entreprises et de soutenir l’économie.
La H2A publie des lignes directrices pour la certification des informations de durabilité
H2A, 2 octobre 2024
La Haute autorité de l’audit (H2A) a publié les lignes directrices relatives à la mission de certification des informations en matière de durabilité et des informations taxonomiques. Alors que les premières publications des entreprises concernées par la directive CSRD sont attendues en 2025, les travaux de certification ont déjà débuté. Ces directives décrivent les travaux attendus des vérificateurs et la manière dont ils exprimeront leurs conclusions, en attendant la norme européenne officielle régissant cette nouvelle mission.
Elles actualisent l’avis technique publié en juin 2023 par le Haut Conseil du Commissariat aux Comptes (H3C) pour tenir compte des textes récents, notamment les normes ESRS du 31 juillet 2023, l’ordonnance de transposition de la directive CSRD du 6 décembre 2023 et ses décrets d’application. Deux modèles de rapport sont également intégrés.
Afin d’assurer une cohérence maximale dans les pratiques européennes, la H2A a considéré les lignes directrices élaborées par le Committee of European Auditing Oversight Bodies (CEAOB), publiées le 30 septembre 2024 à la demande de la Commission européenne.
H2A, 2 octobre 2024
Monopole des experts-comptables et activité illégale : la Cour de cassation définit les contours
Cour de cassation, 4 septembre 2024, n°23-10.446
La Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 4 septembre 2024, qu’une société ne peut être considérée comme exerçant illégalement l’activité d’expertise comptable si elle ne tient pas les documents comptables de ses clients, à l’exception du seul journal des ventes, et n’exerce aucune mission de tenue, de vérification ou de redressement des comptes.
Dans cette affaire, une société gérant la caisse centrale de grossistes au marché de Rungis avait été assignée par un client qui contestait la légalité de ses activités, estimant qu’elles relevaient du monopole des experts-comptables.
La Cour a confirmé que les services fournis (gestion de facturation, suivi des encaissements, mise à disposition de logiciels) ne constituaient pas une activité d’expertise comptable illégale.
Le client a été condamné à verser 20 270 € de dommages et intérêts pour rupture brutale des relations commerciales établies.
Le sondage du mois
Réforme de la facture électronique : Que pensez-vous de l’abandon du développement du Portail Public de Facturation (PPF) au profit des Plateformes de Dématérialisation Partenaires (PDP) ?
Propositions :
- C’est une bonne opportunité pour les éditeurs de plateformes.
- Cela complique la situation pour les entreprises qui comptaient sur une solution gratuite.
- C’est une décision logique pour simplifier la facturation électronique.
- Je n’ai pas encore d’avis sur cette décision.
Le conseil expert du mois
Le 79e Congrès de l’Ordre des experts-comptables s’est tenu à Marseille du 9 au 11 octobre, sous le thème « Embarquement immédiat : du projet de cabinet aux missions de demain ». Centré sur la transformation des cabinets et l’évolution des missions, cet événement avait pour objectif de proposer aux professionnels un guide pratique pour intégrer ces évolutions dans leur structure.
Comme l’année dernière, le Conseil national de l’Ordre met à la disposition des membres de la profession un ensemble de ressources téléchargeables, « les actes du Congrès ». Ils incluent les comptes-rendus des plénières et conférences du Congrès, afin que chaque cabinet puisse appliquer dès immédiatement les concepts et outils présentés pendant l’événement.
Ces actes du Congrès sont téléchargeables depuis le comptexpert de chaque expert-comptable inscrit à l’Ordre.