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Quiet quitting : un nouveau phénomène ?

21 octobre 2022

7 min
Cette année, nous avons vu apparaître sur Tiktok l’émergence de nouveaux hashtags tels que #quietquitting. De nombreux créateurs de contenus sont alors devenus des références dans le domaine, notamment sur le sujet du quiet quitting. En réalité, ils engagent même davantage les collaborateurs que les entreprises elles-mêmes. Nous avons donc décidé de faire nos recherches sur ce qu’il se passe réellement et ce que tout cela signifie pour le futur du monde du travail.

Est-ce que cette nouvelle tendance pourrait être une réaction à une organisation du travail à l’ancienne, qui stagne, et qui ne correspond plus aux besoins et à la vision du monde du travail de la nouvelle génération ? Le quiet quitting pourrait être simplement un nouveau mot pour un vieux problème…

Le marché des technologies RH est en plein essor, et l’offre de plateformes d’engagement, d’enquêtes et d’avantages pour tenter de répondre à un besoin identifié par le Dr William Khan en 1990, appelé l’engagement des employés, a explosé. Qu’est-ce qui engage un collaborateur dans son entreprise et dans son travail ? Les ressources humaines et les technologies peuvent-elles contrer directement le phénomène de quiet quitting ?

Afin de mieux comprendre la tendance du quiet quitting, nous avons jeté un œil à l’origine des modes de travail actuels et de leur évolution. De la promesse d’augmentation de la richesse pendant la révolution industrielle à l’impact post-pandémique sur l’expérience des employés, nous avons également examiné la relation entre la productivité, l’engagement des employés et les crises économiques.

 

Les origines du problème actuel

Les découvertes faites lors du retour à l’époque de la révolution industrielle

En 1929, un économiste anglais du nom de John Maynard Keynes prédisait que, dans 100 ans, nous travaillerions par blocs de 3h, ou seulement 15 heures par semaine. Nous devrions alors nous efforcer de partager le plus largement possible le travail restant.

Pendant la révolution industrielle, les heures de travail atteignaient facilement 14h par jour. Les jeunes enfants devaient aussi travailler pour contribuer à cela, car des familles entières travaillaient dans les usines, pour joindre les deux bouts.

L’amélioration des machines a permis l’automatisation du travail, ce qui, associé à l’influence des syndicats, a conduit à la réduction de la semaine de travail. Toutefois, après la Seconde Guerre mondiale, cette réduction de la semaine de travail a pris un virage à 180 degrés.

Après la guerre, les politiques d’écart de rémunération liées à la productivité ont favorisé l’association de la croissance des salaires à la productivité, permettant ainsi aux employés de profiter des fruits de leur travail.

Dans les années 1970, les politiques ont commencé à perdre de leur efficacité et de leur poids.

Selon une déclaration du Economic Policy Institute[1], issue de recherches menées en 2021 :

La productivité et les salaires ont autrefois grimpé ensemble. Mais au cours des dernières décennies, la productivité et les salaires ont divergé : La productivité nette a augmenté de 59,7 % entre 1979 et 2019, tandis que la rémunération d’un travailleur type a augmenté de 15,8 %.

 

 

Les avantages de cette productivité accrue ont depuis lors été distribués principalement aux 10% (des plus riches), laissant les employés accroître leurs efforts et sacrifier davantage de leur temps personnel pour un salaire égal ou inférieur.

C’est l’une des premières origines du (dés)engagement des employés. Au début, les longues heures de travail étaient supportées par le sentiment d’opportunité, de croissance et d’une vie meilleure à court terme.

Avec le temps, les employés ont compris que les heures de travail n’allaient pas diminuer mais augmenter, et que l’effort ne diminuerait pas non plus. Ils ont alors perdu peu à peu leur motivation, recherchant le sens et l’intérêt dans cette façon de travailler.

 

Qu’est-ce que le quiet quitting ?

De nombreuses différentes interprétations existent pour cette expression du quiet quitting. En regardant les tendances, notamment sur la plateforme TikTok, chaque créateur de contenu a sa propre vision de la signification de quiet quitting.

Cela va du lâcher-prise, voire du laisser-aller, ou encore à la sensation de ne plus ressentir de pression positive au travail, le quiet quitting peut également se traduire par la perte d’intérêt dans la réalisation des objectifs ou dans le résultat des efforts produits.

Le professionnel William Khan invente le terme « engagement des employés » dans les années 1990, pour définir et analyser la motivation et la satisfaction des employés.

Alors, comment l’inventeur de l’engagement des employés définit-il le désengagement au travail ? Le Dr Khan l’explique comme le retrait cognitif et émotionnel des employés de leur travail et de l’organisation. Il s’agit d’employés qui en font juste assez pour rester employés mais qui n’offrent aucune énergie cognitive ou émotionnelle à leur travail. Ils sont ce que l’on pourrait appeler des poinçonneurs.

Dans l’ensemble, ce qui se confirme, c’est un changement de mentalité des travailleurs. Comme si une nouvelle vie leur avait été montrée et que leurs priorités avaient radicalement changé.

Par la suite, nous clarifions les raisons de ce changement d’attitude, qui conduit à un désengagement ou à un départ silencieux, autrement appelé quiet quitting.

 

Le quiet quitting fait-il partie du futur monde du travail, ou est-ce juste un effet de mode ?

Le quiet quitting a commencé après la pandémie. La pression exercée par le travail à domicile avec la famille, l’isolement et les heures interminables de zapping ont amené beaucoup d’entre nous à reconsidérer notre façon de travailler, notre raison de travailler et le degré de dévouement et d’engagement que nous devons manifester envers une entreprise.

Selon les experts, l’abandon silencieux est lié à la Grande Démission prédite par Anthony Klotz. Si vous ne pouvez pas (encore) quitter votre emploi, vous vous concentrez sur d’autres activités. Par exemple, en vous formant ou en vous perfectionnant, voire en créant des activités secondaires. L’une des conséquences de cette situation est le mouvement inverse des entreprises, qui ne proposent que du travail à temps plein sur place, supprimant ainsi toute possibilité de travail à distance.

Des organisations comme Goldman Sachs ont récemment annoncé « le retour officiel à la normale », exigeant que les employés reviennent au bureau cinq jours par semaine.

Le PDG de Goldman Sachs estime que la productivité diminue lorsque l’on travaille à domicile, que les employés prennent leur travail plus au sérieux et qu’ils peuvent être mieux tenus en haleine s’ils sont présents au bureau.

Mais travailler depuis le bureau résout-il vraiment le problème d’engagement ?

 

Le quiet quitting est associé à une productivité réduite, ce qui n’est pas le cas du télétravail

Cela peut sembler évident : le quiet quitting entraîne inévitablement une baisse de productivité. Pendant la pandémie, la main-d’œuvre a atteint des sommets de productivité et diverses entreprises ont réalisé des bénéfices records.

Malheureusement, il n’existe pas de recherche concluante sur le niveau de productivité pendant la période de quarantaine de la pandémie. Cependant, nous savons qu’en 2022, les revenus ont diminué par rapport au PIB, ce qui représente l’écart le plus important depuis plus de 10 ans, soit 3,4 %[2].

 

Si pour certains, le télétravail a nécessité un nouvel état d’esprit et une adaptation, pour d’autres, comme les consultants indépendants et les propriétaires de petites entreprises, il était déjà prouvé qu’il était possible de travailler à distance. Cela demande certes de la structure, de la discipline et des objectifs clairs, mais surtout d’être habilité à prendre des décisions.

 

La révolution industrielle nous a propulsé, qu’en est-il pendant les crises économiques ?

L’incroyable travail de recherche de Gallups apporte un éclairage précieux sur la scène de l’engagement des salariés aux États-Unis, depuis le début de la pandémie.

 

 

La tendance de Gallup sur l’engagement des employés aux États-Unis (avril 2022)[3] montre une diminution progressive de l’engagement des employés depuis 2020 :

– 36% en 2020

– 34% en 2021

– 32% en 2022

Le niveau d’engagement le plus élevé a été enregistré à 37% pour les travailleurs hybrides et les télétravailleurs, contre seulement 29% pour ceux qui travaillent au bureau.

Néanmoins, en examinant le graphique ci-dessus, nous constatons également que les niveaux de « désengagement actif » augmentent pendant les crises. Notez que le niveau atteint 20 % pendant la crise économique de 2008.

En conclusion, l’avenir nous le dira, mais le mouvement de quiet quitting n’est pas entièrement nouveau. Il est possible qu’il soit lié à la crise actuelle, mais ce qui est clair, c’est qu’il est nécessaire de reconnecter et de réengager les employés.

Auteur : Mark Peitersen, Head of Customer Operations Nordics à Cegid Talentsoft

[1] https://www.epi.org/blog/growing-inequalities-reflecting-growing-employer-power-have-generated-a-productivity-pay-gap-since-1979-productivity-has-grown-3-5-times-as-much-as-pay-for-the-typical-worker/

  1. a) Notes: Data are for compensation (wages and benefits) of production/nonsupervisory workers in the private sector and net productivity of the total economy. “Net productivity” is the growth of output of goods and services less depreciation per hour worked. « 
  2. b) Source: EPI analysis of unpublished Total Economy Productivity data from Bureau of Labor Statistics (BLS) Labor Productivity and Costs program, wage data from the BLS Current Employment Statistics, BLS Employment Cost Trends, BLS Consumer Price Index, and Bureau of Economic Analysis National Income and Product Accounts Updated from Figure A in Raising America’s Pay: Why It’s Our Central Economic Policy Challenge (Bivens et al. 2014) « 

[2] Gross domestic product should match income but a GAP has emerged in Q1 2022

[3] Gallup engagement US engagement trend

 

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