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L’épargne salariale grande gagnante de la crise sanitaire, vraiment ?

14 octobre 2021

5 min
C’est un chiffre que l’on entend beaucoup au moment de préparer la sortie de crise : les Français auraient épargné 142 milliards d’euros de plus que la normale pendant la période de pandémie. Livret A, LDDS, PEE… Quels que soient les supports, l’année écoulée bat tous les records. Mais attention au trompe-l’œil, il faut maintenant préparer l’épargne « d’après ». Voici comment éclairer vos collaborateurs et les accompagner au mieux.

2020, une année record pour l’épargne… et 2021 ?

Entre le 1er trimestre 2020 et le 1er trimestre 2021, les Français ont épargné 142 milliards d’euros de plus que ce que les modélisations de la Banque de France prévoyaient. Un phénomène qui s’explique principalement par deux facteurs :

  • Les occasions de consommer étaient réduites par les restrictions sanitaires successives.
  • L’incertitude de la situation économique, voire la crainte du chômage, ont contraint les Français à la prudence et à l’économie. C’est d’ailleurs pour cette raison que les placements les plus sûrs ont été privilégiés.

La collecte du Livret A, qui ne rapporte pourtant plus rien, a doublé sur la période.

« Pactole », « collecte abracadabrantesque » ou « moteur de la relance », l’enthousiasme autour de ces montants est palpable mais les perspectives pour 2021 sont bien différentes et appellent à la modération.

Tous d’abord, les effets de la crise sur les portefeuilles de placement et sur l’activité des entreprises se font déjà sentir. Les versements aux salariés sont attendus en baisse pour 2021.

Les grands groupes devraient réduire leurs versements aux salariés de 20% en 2021, étant donné les niveaux de bénéfices affichés[1].

Ensuite, « l’épargne Covid » est très inégalement répartie au sein de la population. Près de 70% du montant total a été mis de côté par les 20% les plus riches, tandis que les 20% les plus pauvres s’endettaient[2]. On peut donc anticiper des demandes de versements et de déblocages pour les épargnants qui en auraient la nécessité dans de proches délais.

 

Poser des bases solides pour l’épargne salariale : une volonté marquée du gouvernement

Voilà donc pour la dynamique à court terme. Elle ne devrait toutefois pas remettre en cause la tendance de fond d’intéressement des collaborateurs via l’épargne salariale. Le gouvernement a également renouvelé sa volonté de clarifier et de démocratiser ce type de démarche.

Un premier volet de mesures vise à rendre l’épargne salariale plus accessible pour les petites entreprises. Le gouvernement a choisi de faciliter l’instauration des plans d’intéressement au sein des PME de moins de 11 salariés en allégeant les modalités d’adoption. Désormais, le chef d’entreprise peut décider de façon unilatérale d’implémenter un plan pour une durée d’un an, sans négociation formelle avec les partenaires sociaux.

Un second volet s’attache à reformer les produits de retraite collective. Depuis 2020, le Perecol (Plan d’épargne retraite d’entreprise collectif) remplace le Perco, et le Pero (Plan d’épargne retraite obligatoire) remplace l’article 83. Attention, le calcul des prélèvements sociaux sur le Perecol sera par nature moins avantageux que pour le Perco.

En 2021, on note également deux évolutions réglementaires sur l’épargne salariale :

  1. Pour les accords relatifs au PEE, la participation ou à l’intéressement (décisions unilatérales lorsque l’accord n’est pas requis) qui seront déposés à partir du mois de septembre 2021, un premier contrôle sera réalisé par la DREETS avant un second contrôle de l’URSSAF. Ces deux organismes disposent ensuite de 4 mois pour formuler des observations (avec une extension éventuelle de deux mois pour l’URSSAF). Aucun redressement ne peut être opposé à l’entreprise après ce délai.
  2. Le forfait social applicable sur les abondements employeur au PEE évolue.
    1. Il est supprimé pour les entreprises de moins de 50 salariés.
    2. Il passe de 20% à 10% pour l’acquisition de titres de l’entreprise (suppression simple pour les années 2021 et 2022).
    3. Il passe de 20% à 10% en l’absence de versement initial par le salarié.

Un point sur le prélèvement à la source

Pour la participation aux résultats comme pour l’intéressement, il revient en principe aux employeurs d’appliquer le prélèvement à la source au même titre que pour les autres revenus salariaux.

Loi Pacte : une épargne plus lisible et plus attrayante pour le futur

En plus de remodeler les supports de l’épargne salariale, la Loi Pacte a souhaité la rendre plus lisible en réformant le relevé annuel que consultent les épargnants.

Un constat : des relevés vagues, illisibles, et disparates. Depuis le premier trimestre 2021, la loi prévoit donc une harmonisation et liste les informations qu’il est obligatoire de communiquer.

  • La disponibilité des avoirs doit être mentionnée clairement. A chaque somme correspond une date, et les cas de déblocages anticipés qui pourraient s’appliquer.
  • Les frais facturés sont indiqués noir sur blanc par le teneur de compte. Attention cela ne tient pas compte des frais des gérants de fonds ou de fonds de fonds sous-jacents.
  • Les opérations réalisées sur l’année sont récapitulées.
  • Chaque support d’investissement est détaillé, ainsi que sa performance passée.

Ce relooking du bulletin d’épargne doit permettre une meilleure lisibilité et donc une gestion plus renseignée de la part de l’épargnant. Il peut agir sur son épargne de manière dynamique en toute connaissance de cause.

L’autre avantage de ce nouveau relevé, c’est qu’il garantit une meilleure transparence de la part des organismes de placement. A la fois sur la performance de leur gestion et sur les frais qui s’y appliquent.

Comme pour les relevés bancaires il y a quelques années, le législateur a donc pris le parti de mettre un peu d’ordre et de normes parmi les opérateurs du marché.

 » Chacun faisait un peu ce qu’il voulait sur ce relevé annuel. »

Catherine Pays-Lenique | Directrice générale d’Epsens

En conclusion, l’épargne salariale se réaffirme comme un formidable moyen d’accompagner les salariés dans leurs projets d’investissement, d’épargne et de retraite. En cette année 2021 aux perspectives peu lisibles et aux évolutions réglementaires marquées, il sera capital pour les gestionnaires paie et RH de faire de la pédagogie auprès des effectifs.

 

[1] Le Parisien « En 2021, l’épargne salariale va diminuer de 20% »

[2] Le Parisien « L’épargne des Français bat tous les records en 2020 »