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Trois questions à Daniel Wertel, Président de la Fédération Française du prêt-à-porter féminin

23 janvier 2017

4 min

Avec près de 11 milliards d’euros annuels consacrés par les Françaises à leurs achats de prêt-à-porter, le secteur est dynamique mais bousculé. Daniel Wertel a réalisé l’ensemble de sa carrière dans l’habillement. Pour Stores&Stories, il présente sa vision du marché.

Quels sont les grands enjeux de l’industrie du prêt-à-porter féminin pour les années à venir ?

Très concrètement, face à la mondialisation, il s’agit de préserver « la main », le savoir-faire et l’industrie française. Savoir piquer à la machine reste une exigence, au même titre que l’esprit créatif. La mode hexagonale est dynamique, avec le luxe qui tire vers le haut toute l’industrie. Mais les délocalisations sont inévitables pour les entreprises du moyen et haut de gamme : le gros de la fabrication restera à l’étranger encore longtemps en raison de salaires inférieurs. La solution viendra de l’innovation, comme par exemple le lancement de mini collections ou de « capsules » (petites séries). Tout en soutenant l’ensemble des marques, il faut aussi favoriser l’émergence de jeunes créateurs en les encadrant au travers de couveuses et de pépinières comme les Ateliers de Paris, avec lesquelles la Fédération est partenaire. Notre Fédération accompagne toutes les entreprises du secteur, petites ou grandes, en les aidant à chaque étape de leur développement : stratégie commerciale, recherche de financements, débouchés à l’international, etc. D’ailleurs, les 4 et 5 novembre 2015, la Fédération organise le salon Traffic, au Carreau du Temple à Paris, qui est le premier salon de services pour les marques de mode. Traffic mettra en avant tous les services, dispositifs et solutions existants et dédiés aux marques de mode : export, gestion&finance, commerce&retail, etc.

En quoi les comportements d’achat de la consommatrice de prêt-à-porter ont-ils changé ?

La fidélité à une marque c’est fini ! En France, la consommatrice de prêt-à-porter est devenue une zappeuse, une « matcheuse » : elle mélange allègrement haut, moyen et bas de gamme. L’achat de prêt-à-porter reste pour elle un plaisir mais elle ne comprend plus le « juste prix » des produits. Avec la multiplication des promotions, des ventes privées, des pré-soldes et autres journées de braderies, certaines étiquettes atteignent les -70 % ! Cela induit un effet dissuasif, une défiance et en même temps une désinhibition par rapport au marchandage. Désormais, la consommatrice n’hésite pas à négocier, à demander une remise directement en magasin. Dans tous les cas, elle attend l’arrivée des promotions et se rend dans les boutiques pour voir ou essayer les produits mais compare les prix sur Internet et achète au plus bas (showrooming). D’ailleurs, 15 % des achats de mode s’effectuent désormais sur Internet. Pour autant, ce ne sont pas les pure players qui en bénéficient le plus mais les brick and mortars grâce à toutes les stratégies cross canal qu’ils mettent en oeuvre (web-to-store, etc.).

Justement, quelles initiatives technologiques les marques de prêt-à-porter féminin doivent-elles mettre en place pour réussir ?

Il faut que l’ensemble de la chaîne digitale soit pourvu. En amont : un logiciel de CAO pour répondre aux exigences des créateurs, assurer la « vestibilité » de la marque et réussir l’intégration avec le bureau d’études. Dans tous les compartiments de l’activité de gestion : un ERP pour « gagner des points » au niveau des achats et de la connaissance des stocks. Sans oublier la connexion avec les boutiques pour dynamiser les réassorts… En bref, le tableau Excel n’est plus envisageable ! Mais la technologie seule ne suffit pas, elle ne remplace ni l’esprit d’entreprise ni le point de vente physique. Par exemple, un site e-commerce donne de la visibilité mais n’est efficace qu’avec un relais en magasins. Enfin, la maîtrise des outils digitaux au quotidien par le chef d’entreprise est indispensable pour maîtriser les fonctionnements cross-canal, voire omnicanal. C’est pour cela que nous formons les manageurs de demain dans le cadre de l’Institut Supérieur Spécialisé de la Mode (MOD’SPE Paris), une école de management et de gestion appliqués au secteur de la mode et avec laquelle Cegid vient de signer un partenariat. Les nouvelles technologies sont donc bien au coeur de nos préoccupations.